La Cour d’appel de Montpellier, dans une décision rendue le 30 septembre 2025, a annulé et dissous une société du secteur des Legaltechs (entreprises proposant des services juridiques en ligne). Cette affaire illustre bien la règle encore en vigueur au 1er octobre 2025, selon laquelle une société peut être annulée si son objet social (ce qu’elle déclare faire dans ses statuts) est illégal.
Les faits
La société en question, une SAS créée en 2018, avait pour objet le « conseil juridique digitalisé » et la « confection d’actes juridiques ».
Son président était un avocat, ce qui pouvait donner une apparence de légalité.
Mais selon la loi de 1971, seules les sociétés d’avocats ou certaines professions réglementées sont autorisées à :
- donner des conseils juridiques à des tiers,
- ou rédiger des actes juridiques pour autrui.
Or, la SAS n’était pas inscrite comme société d’avocats.
La décision de la Cour
Le Conseil National des Barreaux (CNB) a donc saisi la justice pour faire annuler la société.
La Cour d’appel de Montpellier lui a donné raison :
- Elle a jugé que l’objet social était illicite, car il portait sur des activités réservées aux avocats.
- Elle a rappelé que l’illégalité s’apprécie d’après les statuts, et au moment de la création de la société — pas selon ce qu’elle fait ensuite dans la pratique.
- La Cour a également précisé que l’objet ne peut pas être régularisé après coup, car le Code civil interdit de corriger une société dont l’objet est illégal dès le départ.
- Enfin, le fait que le président soit un avocat n’a pas suffi à rendre l’activité légale, puisque la société elle-même n’était pas reconnue comme structure d’avocats.
En conséquence, la société a été annulée et dissoute.
Une sanction symbolique pour le président
Le président, avocat de profession, a été condamné à verser 1 euro de dommages-intérêts au CNB.
La Cour a estimé qu’il avait commis une faute personnelle, en ayant feint de se conformer aux exigences du CNB alors que la société ne respectait pas la réglementation.
Un changement majeur depuis le 1er octobre 2025
Cette décision s’inscrit dans le droit actuel, mais les règles ont changé depuis le 1er octobre 2025.
En effet, à cette date :
- L’illicéité de l’objet social n’est plus une cause d’annulation d’une société.
- Cependant, exercer illégalement une activité juridique (comme donner des conseils juridiques sans y être autorisé) reste interdit et constitue un délit pénal.
Autrement dit, les sociétés ne pourront plus être annulées pour avoir un objet illicite,
mais leurs dirigeants risqueront désormais des sanctions pénales s’ils exercent des activités juridiques sans y être autorisés.
Nullité d’une Legaltech pour illicéité de l’objet (Cour d’Appel de Montpellier, 30 septembre 2025)
La Cour d’appel de Montpellier a prononcé la nullité et la dissolution d’une SAS du secteur des legaltechs, constituée en 2018. Cette société, dont un avocat était le président, avait pour objet statutaire le « conseil juridique digitalisé » et la « confection d’actes juridiques ».
Le Conseil National des Barreaux (CNB) a introduit l’action en nullité car ces activités sont réservées aux sociétés d’avocats ou autres professions autorisées (Loi de 1971), ce que la SAS n’était pas.
La Cour d’appel a jugé l’objet illicite, soulignant que l’appréciation de l’illicéité se fait sur la base des statuts de la société et non de son activité réelle. Elle a également rappelé que le caractère illicite s’apprécie au moment de la formation de la société.
La Cour a écarté la possibilité de régularisation a posteriori de l’objet, car le Code civil l’exclut expressément en cas de nullité pour illicéité de l’objet. De même, l’argument de l’activité commerciale connexe dérogatoire de l’avocat dirigeant n’a pu être retenu, la société elle-même n’étant pas inscrite à l’Ordre.
Enfin, le président de la SAS a été condamné à verser 1 euro de dommages-intérêts au CNB pour faute personnelle et détachable de ses fonctions, ayant feint de se conformer aux exigences du CNB.
Cette décision conserve sa portée pour les sociétés créées avant le 1er octobre 2025, date à partir de laquelle l’illicéité de l’objet cesse d’être une cause de nullité, mais où l’exercice illégal des activités juridiques encourt des sanctions pénales (délit).